Vous est-il déjà arrivé, lors d’une discussion avec quelqu’un, de vous demander : mais il comprend ce que je raconte ou il le fait exprès là ??? 🙂

Ou alors de vous retrouver à répéter 3/4 fois exactement la même chose pendant un échange téléphonique alors qu’une seule suffisait ?

Ou alors de parler avec quelqu’un pendant 10 minutes, ou plus, et de vous rendre compte à la fin de la discussion que l’essentiel pouvait tenir à peine sur une dizaine de secondes ?

Si vous répondez oui à au moins l’une des 3 questions précédentes alors cet article vous intéressera inchaAllah 🙂 

Lorsque l’on regarde de près les paroles du prophète  on ne peut qu’admirer la clarté de ses propos, leur précision, leur pertinence, leur équilibre et leur exactitude. Il était capable, , de dire en peu de mots de grandes choses, il veillait à ce que ses interlocuteurs entendent et saisissent bien ses propos. 

Une communication verbale claire est une étape extrêmement importante pour la suite de vos échanges. Voyons, à travers les maximes de Grice, les conditions d’une bonne communication plus à même d’impliquer la coopération de vos interlocuteurs.

# 1 Condition de Quantité :

Les informations que vous donnez doivent concerner juste ce qu’il faut, pas moins au risque de ne pas dire l’essentiel, mais pas plus non plus au risque d’embrouiller la réception de l’information initiale si elle venait à être noyée dans une tonne de choses périphériques.

Exemple :

La personne A : Ton frère est là ?

La personne B : Non il est parti en ville pour échanger, tu sais, la veste qu’il avait achetée l’autre jour, manque de chance il n’avait pas remarqué qu’il y avait une tâche dessus, pourtant, d’habitude c’est le genre à faire attention à ce genre de petits détails mais là, le jour là, je ne sais pas où il avait la tête 🙂 tu me diras, avec tout ce qui se passe dans son boulot actuellement, je le plains le pauvre.

Le pauvre lol, il avait posé une question toute simple et se retrouve avec une grande quantité d’informations qui n’apporte rien de plus à la question initiale.

Il est possible que certains parmi vous trouvent cet exemple exagéré ou alors peu fréquent dans la vie de tous les jours. L’observation des discours et des communications de tous les jours fait partie de mes activités et mes centres d’intérêts, on ne s’en rend pas compte, mais nous avons une grande tendance à raconter beaaaaaaaaaucoup plus de choses que ce qui nous a été demandé.

Maintenant que vous le savez, soyez attentifs à vos prochaines conversations et tenez nous au courant 😉

# 2 Condition de Qualité :

Dites uniquement des choses vraies (cela va de soi pour un musulman) mais aussi des choses que vous pouvez prouver ou démontrer. Cela me fait directement penser à une règle de nos savants de la narration, que Dieu leur fasse miséricorde, où ils disaient :

Si tu transmets une information alors vérifie qu’elle soit bien sûre ; et si tu en prétends une alors apporte-s en la preuve

Dire seulement la vérité, ça va, ce n’est pas bien compliqué pour un musulman, il suffit de ne pas mentir.

Par contre, là où nous avons tendance à nous louper c’est lorsqu’il s’agit de dire des choses, non pas qu’elles soient fausses, mais incertaines (potentiellement vraies, potentiellement fausses) ou alors des choses que nous mêmes savons justes mais dont nous manquons de preuves suffisantes.

Alors pour les exemples y en a un paquet, au sein même de notre communauté malheureusement, pour cela je vous renvois à tous les sms et les mails qui circulent en chaîne et qui racontent assez souvent tout et n’importe quoi et dont personne ne peut en vérifier l’exactitude. Là je ne peux que vous rappeler, très chers frères et soeurs, la parole forte du prophète  lorsqu’il dit :

Il suffit à l’homme pour être un menteur de répéter tout ce qu’il entend

On répète ce qui est VRAI et ce qui est UTILE.

# 3 Condition de Pertinence :

La pertinence tient compte du contexte de la conversation. Par contexte on entend l’environnement physique (le lieu de la conversation), l’environnement social (personne seule, groupe de personnes, le type de personnes …) ainsi que la spécificité de notre interlocuteur.

C’est typiquement le genre de détails auxquels nous ne faisons pas spécialement attention.

Il est très important de prendre en compte l’état de notre interlocuteur (fatigue, ennui, distraction, …), cela m’a toujours interpellé de voir certaines conférences durer des heures alors que la moitié de l’assistance baille, certains sont sur leurs téléphones tandis que d’autres discutent entre eux. C’est l’exemple typique de la non prise en compte de ses interlocuteurs.

Ou alors pointer les manquements d’une personne au moment où elle vit elle même une épreuve, ça, même les parents le font lorsque l’enfant fait une bêtise et se fait vraiment mal, on les entend lui dire : t’as vu ? voilà ce qui arrive quand on écoute pas. De quoi avait besoin l’enfant au moment là ? Du réconfort et des soins, sa bêtise on a le temps d’y revenir une fois le mal écarté.

Regardez comment Khadija radiyallahou 3anha a réagi lorsque le prophète  était descendu effrayé de la grotte de Hira, elle a adapté son discours à la situation. Au moment là, le prophète  n’avait pas besoin d’entendre des explications, il avait besoin d’être rassuré et apaisé. Les explications sont venues plus tard.

# 4 Condition de Manière :

Cette condition se manifeste de deux sortes, par la clarté de notre propos et par son excellence.

Notre discours doit être clair, ordonné, sans ambiguïtés donc. Il faut éviter les informations qui ne parlent pas à votre interlocuteur comme le fait d’utiliser des abréviations, un jargon de spécialistes, voire des mots et expressions d’une langue étrangère à celle de votre interlocuteur.

Notre discours doit être produit de la meilleure manière qui soit, en employant les meilleures paroles, les plus respectueuses …, Dieu nous y exhorte clairement d’ailleurs :

Dis à Mes serviteurs d’employer dans leurs propos des mots aimables, de peur que Satan ne sème entre eux la discorde, car Satan est l’ennemi mortel de l’homme. S17/V53

Ou encore :

Et tenez des propos bienveillants aux gens. S2/V83

Lorsque vous regardez bien ces conditions favorisant les échanges conversationnels, vous voyez bien qu’il s’agit là de règles islamiques de bienséance avant tout, dire du bien ou se taire, dire uniquement la vérité, ne dire que ce dont on est sûr, être clair dans ses propos et choisir les meilleures paroles pour s’adresser aux gens, n’est ce pas là très exactement la pratique même du prophète  ? N’est ce pas là ce à quoi devrait aspirer chaque croyant ?

J’ai présenté les choses selon la classification de Grice car elle me parait pertinente, facile à retenir et complètement étayée par la vie du prophète .

Je termine cet article en vous posant la question suivante : Pourquoi avons-nous du mal à nous exprimer selon ces 4 principes ? j’attends vos commentaires 🙂

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21 commentaires

  1. As salam aleykoum, je dirai que j’ai du mal à m’exprimer selon ces 4 principes car :
    – Je n’ai sans doute pas réalisé l’importance de s’exprimer convenablement
    -J’ai tendance à oublié qu’il s’agit là de règles de bienséance en islam
    – il m’est difficile de changer mes habitudes. Lorsqu’on à l’habitude de s’exprimer très spontanément ce n’est pas du jour au lendemain qu’on va réfléchir à tout ce qui sort de notre bouche. Ça demande un effort quotidien sur soi-même et ça nécessite de se demander des comptes en fin de journée 🙂

    barakaAllahoufik pour cet article

  2. Musulmane en forme on

    Merci pour cet article qui m’a fais sourire, et en même temps fais peur , car en effet j’ai tendance à faire le perroquet à répéter ce que j’entends sans forcement m’assurer de la certitude de l’information :/ . Pour répondre à la question , je dirais qu’on est dans une époque ou il y a un grand développement technologique , et l’égocentrisme est numéro 1 “moi, moi et encore moi” .

  3. Non j’arrive assez bien à respecter ces principes. Peut etre un peu trop direct…je suis incapable de meubler une conversation par contre

  4. Le trop direct peut s’avérer NON pertinent par moments 😉

    Sinon, le but est justement de ne pas meubler, de ce côté là, tu es opérationnel 🙂

  5. Salam Alaykoum,

    Un grand merci pour cet article, constructif et intéressant.
    Pour répondre à la question, il me semble que nous vivons dans une société où dès l’école (entre camarades), on apprend à parler à tord et à travers et comme cela a été dit, nous vivons également dans un monde où règne de plus en plus l’égoïsme, on n’adapte plus discours selon son interlocuteur, mais selon notre état personnel.
    Enfin, pour ma part je constate que beaucoup de personnes semblent préférer discuter avec des individus qui racontent ragot sur ragot, ont toujours quelque choses à dire, plutôt que de parler avec des personnes qui ne parlent que pour dire l’essentiel et gardent le silence quand il n’y a rien à dire d’intéressant.

  6. Assalaamou aleykoum!
    Là où ça me pose problème, c’est croire où pas les médias, et donc : peut-on répéter ce qu’ils nous disent ou non?
    (pas seulement les médias français, mais aussi arabes…)

    • wa 3alaykoum assalam

      La règle de base est de ne rien croire sans preuves tangibles ou sans fiabilité avérée du transmetteur, or, leurs images ne peuvent être une preuve tangible et leur fiabilité est plus que remise en cause.

      Se tenir au courant de ce qui se dit est une chose, y croire, pas forcément, voire pas du tout même.

  7. Salam Alaykoum,

    il est vrai que si l’on devait se tenir aux 4 principes, les conversations serait plus riches et plus utiles. Ça m’est arrivé d’en dire plus que ce qu’on m’a demandé, j’avais presque l’impression de me justifier (1er condition). Par contre j’ai toujours eu comme devise “dis la vérité ou tais-toi”. En ce qui concerne la pertinence de la conversation, j’essaie de tenir compte de l’état d’attention de mon interlocuteur et pas juste de vouloir dire ce que j’ai a dire. La conversation est à la base un échange d’informations, de savoir, de connaissances … donc pour qu’elle soit efficace il faut être réceptif à l’autre et inversement. A chacun a du travail a faire sur soi-même.

    • wa 3alaykoum assalam mon frère Malik

      En effet, je constate aussi que c’est par “sentiment de devoir se justifier” que l’on a tendance à en dire beaucoup plus que ce qui nous était demandé 🙂

  8. Salamaleykom,

    Tout d’abord merci pour cet article permettant à la fois de prendre conscience de ses manquements et d’améliorer sa communication. En vous lisant j’ai pris conscience du poids des mots, une vraie réflexion…

  9. Salam alaykom.

    En plus de ce qui a été dit, l’extraversion, le côté expansif, est un truc valorisé aujourd’hui. Alors que qqun de réservé, qui pèse ses mots et ne parle pas pour rien dire, on va lui dire qu’il est timide, coincé, pas intéressant.

    Concernant les conditions de qualité et de quantité : est-ce que ne pas tout dire peut être considéré comme du mensonge ?

    exemple (bidon) : Le parisien X était en déplacement toute la semaine à Londres. Le week end, il n’a pas bougé de sa chambre d’hotel pour terminer une présentation. Ce week end là, il faisait très chaud à Londres, et très froid à Paris. Quand il rentre à Paris, il croise son copain Y.

    Y : T’as fait quoi de beau ce week end ?
    X : J’ai travaillé
    Y : T’a vu comme il faisait froid à Paris ?
    X : J’ai pas mis le nez dehors, j’ai pas fais gaffe

    Tout est vrai, mais certaines infos ne sont pas dévoilées. Est-ce que le fait de ne pas déballer toute l’histoire peut être considéré comme du mensonge par omission ?

  10. Salam A3leykom, barakAllah oufi pour cet article, trés constructif et pertinent. Moi j’ai toujours eut tendance à exagéré sur le point n°1. C’est bizzare mais j’avais toujours tendance à vouloir combler le vide, comme si je n’aimais pas le silence!Sinon pour le point n°2, aprés m’etre fait avoir plusieurs fois, je fait tout pour être plus vigilante!

  11. Instructif. Les meilleurs discours sont les plus brefs. L’art de la synthèse est un don pour certains(es), pour d’autres, il faut l’apprendre.

    Autre point important. Faire respirer la dialogue par des silences. Or, je constate que le silence fait peur, alors qu’il est lui même un langage à part entière.

    Dernière élément : faut savoir que la communication non-verbale représente environ 80% de notre langage. Tout parle à travers nous avant-même que n’ouvrions la bouche : notre gestuelle, notre façon de regarder, nos tics, notre façon de saluer, de s’habiller, de s’asseoir…

  12. Cet article m’interpelle énormément, il me fait presque autant le même effet que la Sira 15 à laquelle il me renvoie. Où il est fait justement mention des maximes de Grice, et notamment des maximes de quantité.

    C’est d’ailleurs ce point-là qui me fait malheureusement beaucoup défaut 🙁

    Personnellement, pour répondre à la question en fin d’article, si j’ai du mal à m’exprimer selon ces 4 principes et particulièrement le 1er, c’est, je pense, principalement pour ces 3 raisons :

    1. Je n’ai pas cette vigilance à l’esprit comme l’avaient Sahabas radyAllahou 3anhoum

    2. Problème d’égo : dans le sens où j’aurai tendance à répondre davantage à mon besoin (celui de parler) qu’à celui de mon interlocuteur (celui de l’informer)

    2. Je n’ai pas du tout l’esprit de synthèse

    Wa astaghfiroullah al 3azim, wa 3ilmou lillah.

    Qu’Allah m’ (nous) aide à intérioriser les enseignements de la Sira 15 et à concrétiser les enseignements de cet article, suivant la Voie de nos pieux prédécesseurs radyAllahou 3anhou ajma3ine.

    Barakaallahou fik pour ce Rappel !

  13. Assalam aleycoum.

    T’manière le problème vient pas de nous, c’est l’autre la en face qui sait pas parler et qui comprend rien. ^^
    (réponse typique d’une personne ayant des problèmes de communication, qui ne fait quasiment rien pour les changer et qui préfère se dire que le souci , bah il vient des autres ^^)

    J’ai beaucoup aimé l’article, dommage que je ne le découvre que maintenant.
    (oui oui on sait, mieux vaut tard que jamais lol)

  14. J’ai beaucoup aimé la condition quantité qui me rappelle ma triste réalité soit mon plus gros point d’amélioration ( à tout point de vue)… Comme dirait mes collègues ” qui a osé lui poser une question ouverte” très ou trop bavarde…à une question je donne plus qu’il n’en faut…alors si on parle de condition de qualité de pertinence et de manière je suis loin de la vérité..
    Je te remercie pour la référence du livre ” le guide de la communication” que je vais m’empresser d’aller acheter car je suis plus consciente du problème et volontaire pour remédier à cet horrible défaut qui peut parfois rendre mon retour, ou mes discours ennuyants.
    Juste une petite anecdote : en sortant d’un RDV déjeuner avec un client la semaine dernière, je l’ai jugé de timide “comme le disait un frère ou une sœur dans les commentaires plus hauts” alors qu’il se contentait de répondre à des questions.
    Pour meubler un déjeuner on peut parler de bcp de choses mais faut il encore avoir un bavard en face…
    Pro ou perso mes questions n’amenaient que des réponses brèves de sa part “Vous êtes un peu partis en vacances? Oui une semaine. Vous avez des enfants? Oui 3”
    Je suis rentrée de RDV en disant à mon responsable mais plus jamais j’invite ce client a déjeuner c’est une torture…il parle pas…
    Mais en réalité la torture c’est moi qui répondaient a mes propres questions et pour le comble des questions qu’il ne m’avait même pas posé…
    Qu’elle belle leçon que de tous vous lire!
    S’il existe une formation sur l’esprit de synthèse je serai ravie..

    • Effectivement, les conditions de quantité et de qualité sont super importantes. Formation sur l’esprit de synthèse ? c’est clair que ça dépannerait pas mal de monde lol

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